jeudi 7 août 2008

LA SARDAIGNE À LA TRAÎNE



LA SARDAIGNE À LA TRAÎNE 




Cet article commence à BONIFACIO, Corse
Le 20 août 2008
Mes coéquipiers sont (est) Edmée DESCHAMPS




Le 20 août à 9 heures 45, nous laissons derrière nous les bouches de BONIFACIO pour le nord-ouest de la SARDAIGNE. Le vent de nord-ouest monte progressivement à 15/17 nœuds. C’est pas la tempête mais on avance à 6/7 nœuds… En silence. 


Isola Piana
(Photo du net)

Arrivée à 13 heures au mouillage forain d’ISOLA PIANA. Mouillage sur un fond de sable dans une eau claire. Pas même une sardine en Sardaigne. A vingt mètres du bateau, un détail pas plus gros qu'une tête d’épingle se distingue dans ce désert aquatique. L’eau n’est pas polluée par les crottes de poisson ! C’est pas ce soir qu’un bec de cane se fera dorer au four et aux petits oignons !

A l’aube, l’étroit et peu profond passage entre Isola Piana et FORNELLI est embouqué. Les alignements à respecter sont bien indiqués. C’est avec soulagement que je retrouve des eaux plus profondes et la haute mer.



Marina d'Alghero

Alghero est à 41 milles. Le bon vent de nord-ouest se lève à nouveau. Pamplemousse adore. Il ronronne comme un vieux chat de gouttière repu. Toutes voiles dehors, c’est plaisir à voir car peu fréquent dans cette Méditerranée où les vents sont capricieux comme une belle femme.

ALGHERO est une belle ville qui regarde vers la mer du haut de ses imposants bastions du XIVe siècle. La ville a la réputation d’exceller dans le travail du corail. Nous explorons la ville à vélo. Nous flânons sur son beau front de mer garni de boutiques et de négoces de toutes sortes. En face, un mur d’immeuble d’architecture régulière de style baroque où règne une activité fébrile. Lorsque nous nous engageons à l’intérieur, le vernis tombe, la crasse règne, comme dans beaucoup d’agglomérations claquantes en façade.


Une navette pétaradante nous transporte jusqu’à l’entrée de la grotte de Neptune, dont l’accès maritime est réservé à ces embarcations, qui déversent régulièrement un flot ininterrompu de touristes. Existe aussi un accès par la terre sous la forme d’un escalier taillé dans la roche à flanc de falaise. Déconseillé aux cardiaques. La grotte vaut le déplacement. A ne pas manquer si vous passez par là. Nous décidons de visiter FERTILIA et son exposition internationale de sculptures en sable. Sept kilomètres à bout de pédale.


Les horaires d’ouverture de l’expo sont hors patience. Un coup d’œil à travers la palissade permet de juger du travail éphémère des artistes et d’économiser trente   euros. En guise d’expo, on fait le supermarché du coin. C’est moins intellectuel mais ça remplit les frigos. Les Algheresi sont affables, accueillants et n’hésitent pas à tailler la bavette avec le touriste fouineur même si la conversation tient plus du langage des signes que d’un discours devant le sénat américain.


ORISTANO est à 48 milles. La météo a programmé un mistral force 7. Il va falloir sortir le tourmentin, rouler le cacatois et brasser le perroquet. En l’occurrence c’est une perroquette qui me jaquette dans les oreilles pire que les 60èmes rugissants. C’est ma bergère au doux regard qui chuchote ! En fait, la guerre de force 7 n’aura pas lieu. Relâche; A la place, un petit force 3. Pas de quoi fouetter un chat. L’ancre est jetée à une encablure de la ville, sous le vent d’une plage interminable où quelques rochers semblent propices à la présence de picots et mulets bleus.


Armé d’un épervier, je drague sans succès sauf à charger le filet d’une cargaison de végétaux maritimes et chlorophylliens. Des algues quoi, tout juste bonnes à remplir l’assiette d’un samouraï. C’est pas ce soir qu’on se fera un sashimi de sardines grillées.



Animation sans pareille...

L’Isola di SAN PIETRO est à 52 milles. Un voilier amical, à portée de voix, me donne la météo. Force 7 prévu, traduire force 3 sur les flots. L’isola cache la petite ville de CARLOFORTE, où règne une animation sans pareille. Les terrasses des cafés sont bondées. La circulation est intense. Les rues sont propres. Les devantures peintes de couleurs vives à la mexicaine. Toujours ces belles églises où la fraîcheur et le calme sont propices sinon au recueillement mystique du moins à une halte reposante à l’abri de la chaleur et de l’activité fébrile extérieure.

Crépuscule sur la marina
de CARLOFORTE

Départ à 7 heures 30 pour rejoindre l’ultime étape en Sardaigne : CAGLIARI, éloignée de 64 milles. De crainte de devoir entrer de nuit dans la marina, nous faisons une halte en mouillage forain près d’une petite marina à quelques milles de la destination. Palmes, masque, tuba, fusil en réserve au cas où se présenterait une mère loche. Ni la mère ni la fille ne souhaitent faire la une de la marmite à Pamplemousse. Trempette, pour le fun. Le fond est désertique. Le vent tourne de 180°. Il génère un clapot qui ne cessera pas de toute la nuit.

Les aléas du mouillage en pleine eau. Les lumières de Cagliari brillent de mille feux et font concurrence aux étoiles. Depuis la remontée vers les latitudes nord, j’ai appris à reconnaître les constellations boréales. La Grande Ourse, souvent confondue avec Orion, la vedette étoile Polaire, pas facile à repérer dans ce ciel inconnu. D’autres, tant d’autres. C’est beau. C’est infini. C’est oppressant.




CAGLIARI

La capitale CAGLIARI s’imagine dans le lointain, puis se détache, se découvre, apparaît dans sa diversité. La marina di CAPITANA est en pleine ville. Dommage que la taille de Pamplemousse l’exile vers la cale de halage, où la propreté n’est pas au rendez-vous. D'énormes mulets, (chez nous on appelle ça des « queues bleues ») broutent la vase des coques. Il y en a des milliers sous chaque bateau. Avec le fusil sous marin, je pourrais en faire une razzia facilement mais le service d’hygiène du bord, vu la clarté de l’eau nauséabonde et pire, met son véto. Il faut s’abstenir, ouvrir une boite de thon et éplucher des oignons.

Eglise Santa Caterina à Cagliari

Au moment d’enfourcher mon vélo vingt-quatre heures du Mans, nouvelle crevaison. C’est désespérant. 


Nous commençons par la splendide via Roma, qui longe le front de mer. Cette voie bordée d’édifices de style baroque et de couleurs diverses et sombres, est immense. Sous les arcades règne une activité bon enfant. J’ai vite fait de repérer le kiosque à journaux qui vend « le Monde ». Quant à Edmée, elle fait son affaire chez le coiffeur et dans les nombreuses boutiques qui ont pignon sur la Roma. Les plus grandes marquent de fringues se font une concurrence acharnée à coups de « Saldi » à moins 50%, pour le plus grand bonheur de l’élégante chalande cagliaritana.



Il Palazzo Civico di Cagliari

A l’une des extrémités de l’avenue trône le splendide « Palazzo civico », la mairie en bon français, d’une blancheur éclatante et pour cause, il est construit en marbre blanc, dans un style combiné art-nouveau avec le traditionnel penchant sarde pour les décorations florales. Il date du XVIIIe siècle. Il est aussi tristement connu pour la répression sanglante des premières grèves du XXème siècle sous ses murs. A noter que le musée archéologique national est le plus important du monde en ce qui concerne la civilisation nuragique (premiers peuplements Sardes, vers 6.000 ans avant J.C.)



CAGLIARI

La vieille ville s’étend sur les hauteurs. Elle encadre la cathédrale, restaurée en 1930. La façade baroque a été modifiée dans le style pisan médiéval. Les murailles et de nombreuses constructions de la vieille ville ont été construites en pierre calcaire, abondante dans la région. La vue sur la ville et le port est saisissante. La basilique de San Satumino est une des plus importantes constructions paléochrétiennes de Sardaigne. Elle est dédiée aux martyres trucidés pendant le règne de Dioclétien. On retrouve cet empereur dalmate, qui a construit le gigantesque palais autour duquel s’est construite la ville de Split en Croatie (voir les tribulations de Pamplemousse en Dalmatie !)


Du large, nous avions entrevu avant l’accès au port de gigantesques terrassements. Renseignement pris, il s’agirait du développement futur de la ville, comprenant un nouveau musée, un stade de vingt-cinq mille places, un grand amphithéâtre, un hôpital, un campus universitaire, etc. En construction également, un métro. Il faudra revenir quand ce sera terminé, en 2050 ! 


Le 29 août à 9 heures, nous larguons les amarres. Adieu Cagliari. Les cœurs serrés de voir s’éloigner les rivages de cette ville si attachante. C’est la dure loi du vagabond. Place aux souvenirs.

 


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