DE THURSDAY ISLAND À DARWIN

DE THURSDAY ISLAND À DARWIN Cet article commence à THURSDAY ISLAND, Australie Le 24 avril 2005 Mes coéquipiers sont Norm† puis Gilbert GAMBARDELLA Norm porridge (Photo du net) Dimanche 24 avril. Cap sur DARWIN contre un courant à tout casser après un hot-meal bien tassé. Porridge à la Norm. C’est du béton. Nous sortons du port sous le regard narquois de la pleine lune.  Adieu le détroit de TORRES, qui n’a pas été si méchant, finalement, et vive la mer d’ARAFURA et le golfe de CARPENTARIE. Notre route est pile-poil vent arrière. Un hélicoptère nous survole. Norm saute sur la VHF. Je l’entends qui s'égosille. Je m'étonne de sa dextérité à utiliser la radio quand je constate qu’il est en train de se péter les cordes vocales dans le vide ; la VHF n’est pas allumée. (Photo du net) Cette nuit, Pamplemousse se donne en spectacle accompagné par la mer, le vent et la pleine lune. Le quatuor s’en donne à cœur-joie et nous offre un son et lumière de rêve quand le vent pique une colère à 40 nœuds. Avec la mer qui se creuse en parallèle il faut prendre un ris. A contrecœur, car on file avec des pointes à 10 nœuds et Pamplemousse ressemble à un gros papillon rasant les flots avec ses voiles en ciseau. Malgré ou à cause des harnais de sécurité, nous avons pris une bonne douche, mais la manœuvre s’est déroulée comme à la parade. Au réveil, Norm en pleine forme saute sur les lignes de traîne. En forme et en verve. Il me parle de ses enfants. Une de ses filles est alpiniste. Elle est championne d’Australie. C’est sa passion et elle en vit. Emporté par son amour paternel, il me montre photos et coupures de journaux où on la voit agrippée comme une araignée sur un escarpement vertigineux. La deuxième est nutritionniste aux USA. Je comprends mieux son goût pour la nourriture saine et simple. Suit un sermon sur le danger des plats trop assaisonnés. En tout cas, ça lui réussit bien. Il est sec comme un coup de trique.  Mardi 26. L’anémomètre monte à 45 nœuds. Je retrouve, dans la lueur blafarde du jour naissant, la houle devenue agressive, les violentes embardées du bateau, de vieux et mauvais souvenirs. Un coup de vent assorti d’une pluie furieuse s’est abattu sur nous sans crier gare. Nous apprécions la bâche arrière qui nous protège, et les instruments avec, d’une copieuse douche. Dès qu’un calme relatif revient, Norm jette les lignes de traîne et je me lance dans la confection d’un gâteau au chocolat. Le résultat est abominable. Norm éclate d’un fou rire que je ne lui connaissais pas. Vexant ! Du coup, et pour la première fois, il veut me montrer ses talents de cuisinier. En un tournemain il nous fait des pancakes. Délicieux, il faut reconnaître. Doublement vexant ! Je le complimente malgré tout et j’ajoute : " Maintenant, c’est toi qui feras la cuisine et moi la vaisselle ! " Lui si discret, réservé, taciturne se déchaîne : " Oui, parce que j’ai été une fois sur un voilier américain avec un cuisinier français. Il cuisinait aussi très mal, mais alors toi, tu bats tous les records, tu cuisines vraiment comme un cochon ! " Triplement vexant. (Photo du net) La veille est cool sur ce parcours peu fréquenté et se limite à un coup d’œil endormi, entre deux assoupissements profonds et prolongés. Pamplemousse file ses 7/8 nœuds sans sourciller. Comme un géant les bras en croix, il trace un imposant sillage écumant. La lune ronde et plate est majestueuse. Comme si un discobole géant s’apprêtait à la lancer à l’infini, elle joue sur cette houle ample et majestueuse. C’est un vrai bonheur. Jeudi 28 avril. Nous ne sommes plus qu’à 118 milles de Darwin. Il a fallu détangonner pour entrer dans le large chenal et laisser MELVILLE ISLAND sur tribord. Aujourd’hui, la mer a décidé de nous en faire voir de toutes les couleurs. Au propre comme au figuré. Dans ce détroit peu profond, l’eau est d’un vert émeraude qu’il serait plaisant d’admirer si, lors de la renverse de marée, le vent à contre courant ne la rendait aussi désagréablement indocile.  Le pauvre Pamplemousse est secoué dans tous les sens. Dans cette marmite en ébullition, des vagues venant de toutes parts balaient le pont. C’est intenable, d’autant qu’on fait presque du sur-place. Il faut attendre sagement et patiemment la renverse. Quand elle arrive, la mer s’aplatit comme par miracle et nous filons à bonne vitesse. Lorsque de nouveau nous serons, quelques six heures plus tard, en butte à ce phénomène, sagement nous mouillerons et attendrons des temps meilleurs. A 9 heures du soir, l’ancre est jetée. DARWIN CULLEN BAY MARINA Vendredi 29 avril, 3 heures du matin. C’est reparti. Impressionnant, de filer à 9/10 nœuds sur le fond avec un spido qui indique 4/5 sur l’eau. Bien vite, nous entrons dans le port de CULLEN BAY. Au fond, la marina, fermée par une écluse. Le lock master qui commande l’écluse est à son poste mais avant il faut attendre qu’un technicien vienne inspecter et traiter toutes les évacuations du bateau pour éviter la prolifération de moules dans la marina.  Pourtant, une moule fraîche… ça laisse rêveur ! Le traitement doit faire son effet vingt-quatre heures. Ce n’est donc que le lendemain que Pamplemousse prend sa place dans la marina. Il y a beaucoup à faire. Par bonheur, le centre-ville est à porté de pédale et Norm s’en donne à cœur-joie ! Moi aussi, mais il n’y a qu’un vélo, alors on se le partage. Nous attendons Gilbert avec impatience. Pour partager à trois le vélo. Dimanche 1er mai. Gilbert arrive avec armes et bagages. Je l’attends au pied de la passerelle… de l’autobus. Il apporte nouvelles fraîches et bouquins. Les deux sont précieux. Gilbert s’adapte très vite et prend pleine place dans l’équipe. Les menus travaux et petites réparations avancent bon train dans la bonne humeur générée par le nouveau venu. Changer à nouveau les feux de position, réparer la fuite dans un boudin de l’annexe, etc. sont jeux d’enfant dans de pareilles dispositions. Dernière opération d’envergure : la corvée de ravitaillement. Trois énormes chariots pour 350 dollars, c’est donné. Il faut dire que Norm n’a pas son pareil pour dénicher la bonne promotion et le bon produit au meilleur rapport qualité prix. ===OOO===