dimanche 12 juillet 2009

DE LA SICILE AUX BALEARES EN PASSANT PAR LA SARDAIGNE





DE LA SICILE AUX BALÉARES 
EN PASSANT PAR LA SARDAIGNE



Cet article commence à CATANIA, Sicile
Le 6 juillet 2009
Mes coéquipiers sont Edmée DESCHAMPS, Gilbert GAMBARDELLA, puis Michel BESNIER et ÐOÀN DUY LỢI, avec un bref essai à quai de Rolande BESNIER 




CATANIA-SICILE

À 8h30, nous ne sommes plus qu’à 30 milles de CATANIA. La météo avait prévisionné un près serré à l’approche des côtes siciliennes. Pas d’erreur, on est bon pour un finish. Remonter grand-voile et moteur, ça refuse dure. Les 113 milles sont bouclés à 13 heures 15.

CATANIA 
Gilbert reprend des forces dans sa cabine pendant que nous allons en exploration, retrouver nos repères d’antan, notamment la magnifique place centrale et son restaurant de fruits de mer. Après mille kilomètres et l’exploration d’autant de boutiques, retour au bateau, épuisés. Le sens de l’orientation s’épaissit comme les souvenirs et la béchamel oubliée sur le feu.


CATANIA 
En entrant au port, le douanier de service, ébloui certainement plus par les contours d’Edmée que par mon italien de paillasson, nous taille une bavette interminable ! 



Nouvelle déambulation à l’assaut du « DUOMO », cette fois en bus et avec le renfort de Gilbert, qui a du mal à retrouver où il habite. Recherchons cause double emploi prise électrique européenne. Comme à Malte, la normalisation n’a pas cours. Edmée reste à son shopping et les deux lascars prennent le bus pour revenir au bateau.
CATANIA, IL DUOMO 
Mauvais choix. Une galère pas possible. Après un parcours interminable, nous nous retrouvons pile poil au point de départ. Catania, c’est la cata ! Rebelote, cette fois après information auprès d’un quidam qui a dû naître avant Jules César. Les bus, ça manque pas. Il en passe sans arrêt. Chaque fois, notre néandertalien, interrogé du regard, fait un non méprisant. Enfin, notre guide des cavernes nous fait un signe approbateur réjoui. 

Evidemment, nous ratons le bon arrêt et nous retrouvons à la gare centrale, à l’infini du port. Edmée arrive quelques minutes plus tard, réjouie elle aussi. 

Pour prendre le ferry pour NAPLES, d'où Edmée continuera sur Paris et Nouméa. Il faut se traîner les bagages à l’opposé du port. Un travail d’Hercule.


NAPLES-ITALIE 

Arrivée à NAPLES le 8 juillet à 9h30. Taxi. C’est cher, comme de juste. Dangereux, évidemment. Il conduit comme un abruti napolitain pur sucre. Il nous assène, jovial : " A Napoli, la règle c’est qu’y a pas de règle ! " À grand renfort de gestes superbes, négligeant la direction de son véhicule et ajoutant : " Liberté totale… " mais égalité, là, c’est pas pareil !

Le train pour CASTELLAMARE DI STABIA, on connaît les pièges. Pas tous. On se retrouve en rase campagne ou presque, attendant une hypothétique connexion à deux pas de Castellamare avec un tortillard de banlieue, tagué jusqu’au carburateur. Et notre hôtel qui n’en finit pas de se faire attendre. Enfin l’hôtel. Téléphone au loueur de voiture : " Pronto ! Vincenzo ? - Si ! Come va ? - On arrive à 4 heures pour la macchina ? - Ok ! " Encore faut-il y aller, chez Vincenzo. C’est pas la porte à côté. Pas évident non plus pour trouver le bon bus, le bon arrêt, le bon tout, quoi !

Le chauffeur du bus, ou plutôt la chauffeuse, qui ne risque pas de se faire emporter par la plus forte rafale de vent sur terre, refuse nos euros. " Vous donnerez ça à un receveur s’il en vient un ! " Il n’en vient pas ! Vincenzo nous a préparé la macchina. Le réservoir est vide, évidemment. Le groom la parque pour 10 euros et nous prévient : " Elle roule sur la réserve ! Il y a une grève du carburant, toutes les stations sont fermées. " Le Vincenzo nous a roulés. Après appel revendicatif auprès dudit loueur coupable d’avoir loué une voiture sans essence sachant qu’on ne pourrait pas en trouver, explication : seules les stations AGIP sont touchées par le mouvement. Si Naples nous était conté. Visite-recherche de ses racines napolitaines pour Gilbert. Tourisme pur et dur pour moi, shopping pur et dur pour Edmée…

Edmée perdue dans ses boutiques, nous, pas pour des prunes dans les multiples et étroites ruelles de la cité. De guerre lasse de tourner en rond, exhortation à l’aide auprès d’un local. Il était temps, on partait pour Rome. Déjeuner de fruits de mer avec fish sur le menu mais pas dans l’assiette ! une arnaque de plus. Ben oui ! mais crawfish c’est pas du fish, bande d’ignares ! Retour sur Castellemare avec la traditionnelle erreur d’aiguillage sur l’autoroute. Tourisme obligé sur Pompéi.

Ces Napolitains sont capables du meilleur comme du pire. Dans le meilleur c'est ce groupe de policiers interrogés sur la meilleure pizzeria du coin. Ils renseignent avec force détails accompagnés comme il se doit d'amples gestes adéquats. Pour clore, Gilbert assure : " Il faudrait changer nos policiers par des Napolitains. Les nôtres, ils font toujours la gueule ! L’autre avec un sourire en tranche de pastèque : - Oui, nous sommes plus jovials ! "
  
Ou ce quidam interrogé sur sa Mobylette pour trouver la gare du coin : " Suivez-moi ! " Et il part à fond la caisse, zigzagant entre les voitures, au nez de policiers placides. Peine à suivre. On finit par le paumer dans cette circulation désordonnée. Deux minutes plus tard, on frappe à la vitre. C’est notre guide. Il nous remet dans le droit chemin.

Le pire, c’est le copain, Vincenzo, le loueur de voiture, qui m’envoie du " Charly" grand comme le bras avec son accent de soprano, mais qui prétend que la voiture à une éraflure de plus. Parmi les nombreux échantillons divers et variés qui fleurissent sa carrosserie, il a un œil de lynx. " Je te fais un prix à 100 euros pour l’éraflure ! " Cest le prix du n’importe quoi, son éraflure. Elle a dû déjà lui rapporter au moins 10.000 euros, cette éraflure. C’est le prix du foutoir généralisé. Sympathique mais épuisant.

Le Gilbert en profite pour prétendre : " Le Charly, il conduit tellement mal que, quand il se gare, même les roues arrière sont de travers ! "

Edmée prend l'avion... 
11 Juillet : Edmée prend l’avion et nous le ferry, dans la foulée. C’est pas la joie. La cabine de ce foutu ferry est climatisée à outrance. C’est la banquise. Rien ne peut nous réchauffer. Je bloque comme je peux l’entrée d’air froid mais le souffle est trop puissant et finit par rejeter impitoyablement tout ce qui l’entrave. On fait main basse sur couvertures et draps qui garnissent les couchettes supérieures. On évite ainsi la surgélation. 


Arrivée Catania 9h00. Qu’il est bon, ce soleil qui nous réchauffe les os !

GIARDINI NAXOS-SICILE

À peine sur le bateau, calcul de la distance pour GIARDINI NAXOS : 21 milles, c’est la porte à côté. 


Bancomat, achats de dernière minute. Eau minérale, frizzante et plate, mais surtout pesante. Les roulettes du sac de Gilbert n’y résistent pas. Départ, midi. Un crochet vers le port de pêche pour faire le plein. Pas possible. La quille frôle le fond. Demi-tour, départ effectif 13 heures. Trois lignes de traîne qui traînent, pour faire joli.

Bon vent de travers de 12/15 nœuds. Arrivée 17 heures. C’est dimanche. Les bateaux à moteur sont de sortie, comme des escargots après la pluie. Malgré le calme de la baie, Pamplemousse se trémousse bord sur bord dans cette calvacade incessante de barcasses pétaradantes et polluantes. Il faut attendre la tombée de la nuit pour retrouver une mer plate. Il fait frais. Il faut ressortir les couettes.


Départ de GIARDINI pour TAORMINA à deux pas. 


TAORMINA-SICILE 

Le théâtre antique de TAORMINA 
Mouillage forain, mais payant pour avoir droit à une bouée. Montée en bus à Taormina. Gilbert fait le plein de cartes postales.

Départ 13 heures pour MESSINE. Nous rencontrons plusieurs chasseurs d’espadons, avec leur étrave que le nez de Cyrano n’en est qu’une ébauche, et leur vigie en tête de mât qui s’équipe comme un cosmonaute, vu l’altitude. Malgré leur impressionnant équipement, ils ne sont pas moins bredouilles que nous. Le vent tape dans les 22 nœuds. Pamplemousse fait du surf. À l’approche de la nuit, je prends un ris. Bien mal m’en prend, le vent s’évanouit au plus vite.

MESSINE-SICILE

Le duomo de MESSINE 
L’approche de Messine est épuisante. Les lumières de la ville empêchent de repérer les petits feux qui mènent à la marina. Par bonheur, le phare est d'une aide précieuse. Arrivée MESSINE 23 heures 30, épuisés. 

Visite de la ville et principalement du Duomo et son remarquable plafond de bois ; pas le temps d’attendre midi et le défoulement des marionnettes qui font leur show traditionnel à cette heure. La demi-nuit de marina nous coûte 110 euros. Gilbert a du mal à le digérer ! Et moi donc, qui suis encore plus radin!

MILAZZO-SICILE

Départ du wharf à mazout 16h00. Arrivée MILAZZO à 21 heures. Mouillage forain dans un calme plat total. Cette petite ville est le point de départ des ferries pour les îles Eoliennes. Au petit matin, remise en place de la bosse du premier ris qui s’est fait la malle à cause d'un nœud de chaise mal serré. Dans l’après-midi, en guise de sieste, petite plongée rafraîchissante pour récupérer une fourchette. Annexe à l’eau. A la rame, les deux p’tits vieux partent faire leur marché, mais le super est super loin. Il nous faudrait des patins. Gilbert est content, il a refait son stock de pâtes, de soupes et de pain.

TINDARI-SICILE
 
...dominé par l'incroyable 
et magnifique basilique 
Départ 6h30 pour TINDARI. Mouillage forain dominé par l'incroyable et magnifique basilique, récente sinon moderne dédiée à la Vierge noire. Elles foisonnent, dans le sud bassin méditerranéen. 

Plongée aux oursins, la passion de Gilbert. J’en rapporte avec des piquants plein les doigts malgré les gants. " C’est des oursins juifs, bons à balancer à la mer ! me dit mon compère avec un regard méprisant. - Comment ! Ne pas savoir reconnaître les bons oursins ! - Mais, à Boulouparis, on bouffe pas ces saloperies ! "
Pêche à la palangrotte - chez nous, on dit pêche à la ligne - point-barre !

Il faut reconnaître que le pied-noir, avec ses gros sabots, il est habile. En un tournemain, il te monte douze sarans, un poulpe, un sar. Forcément, des poissons zoreilles, il faut avoir le doigté ! Même nos communards, y sont pas aussi vicieux. Ceux-là, t’as pas lancé la ligne qu’ils ont déjà bouffé l’appât et se sont tirés vite fait !

À CEFALLU, mouillage forain qui répond au doux balancement des embarcations qui se font un malin plaisir à nous chahuter.

SAINT-NICOLAS marina par vent de travers, la prise de wharf est catastrophique. Emplacement minuscule à prendre étrave en avant entre deux bateaux. Bref, nous dégageons de ce piège pour mouiller à l’extérieur. La houle du large entre dans ce semblant d’abri. Nous sommes secoués toute la nuit, sans compter avec la boîte de nuit non loin et sa musique barbare qui nous casse les oreilles, toute la nuit également.

Le 19, nous arrivons à la marina ARENELLA, à un mille au nord du port de PALERME, au pied d’un antique fort, dans un quartier délabré. Ça n’empêche que la marina nous coûte 132 euros, et encore, c’est un prix d’ami ! Forcément, nous sommes sur un wharf de bateaux de milliardaires. Ce n’est pas le moment de traîner en guenilles, avec les nanas somptueuses qui ornent des bâtiments de rêve.

La météo est favorable pour la traversée sur Cagliari. Dès 8 heures, chargés de nos sacs à dos, nous voilà partis à la recherche d’un supermarché. Avant tout, je fais, consciencieusement, un check-up du moteur. Je constate une fuite d’eau. Je goûte, elle est salée. C’est une durite. En chemin, nous rencontrons des ouvriers du port, auxquels j’expose problèmes de durite et de supermarché. L'un d'eux prend les choses en main. " Revenez à 8h30, je vais vous résoudre vos deux problèmes. La camionnette du supermarché viendra vous chercher, et je vais vous trouver un mécanicien qui va vous faire le travail ! " Super, de chez super ! À peine revenus du marché dit super, le mécanicien arrive. À part qu’il travaille comme un cochon, il résout le problème vite fait. C’est pas la durite, c’est le tuyau en bronze, qui est percé. Il est mort, de jeunesse, et remplacé par un tuyau en plastique qui fera l’affaire provisoirement. Le tout pour 43 euros. C’est donné, pour être dépanné si vite !

À 11h30 le 20 juillet, nous prenons la mer pour CAGLIARI, à quelque 200 milles par un bon vent de travers qui tourne autour des 15/20 nœuds. Pamplemousse adore. Il file toutes voiles dehors à plus de 6 nœuds. Un temps de marin d’eau douce, n’étaient ces cargos qui vont et viennent dans tous les sens et nécessitent une vigilance sérieuse. Obligé de rester éveillé pendant mon quart, ça c’est barbant ! Arrivée à Villasimius, à quelques encablures de Cagliari, le 21 à 21 heure 30, toujours bredouilles avec les lignes de traîne, à poste de l’aube au crépuscule avec une constance à toute épreuve.

Mouillage forain, près de la marina. Exploration de la marina et des prix de ses services. Rien n’est donné, pas même Internet, à 5 euros de l’heure sur un poste qui date de la guerre de 14. Le shipchandler sympa nous aide à diagnostiquer les arrêts intempestifs, des plus désagréables, du propulseur de l’annexe : c’est la pompe du tuyau d’arrivée d’essence qui a une prise d’air et ça, il aime pas, le petit Mariner.

Le 23 à l’aube, j’embarque le vélo et Gilbert dans l’annexe. Je compte aller jusqu’à la ville de VILLASIMIUS et trouver un Internet-café. Il n’y en a qu’un, il ouvre à 10 heures ; retour à la marina. Sur le chemin, éblouissement auditif. Dans le brouhaha de la circulation, l’oreille experte a détecté le bruit d’un swing de golf bien asséné. Je freine à mort et constate qu’un fairway trône à deux pas de la route. Décidément, elle est pas mal, cette marina !

Gilbert était reparti au bateau avec l’annexe. Bateau stop pour moi. Un couple de VERONE m’embarque. Je saisis l’occasion pour entretenir mon italien. Ils me vantent Vérone. Je vante la Calédonie. Il faut expliquer où se trouve cette « piccola isola ». Je les épate. Je reviens avec Gilbert, avec l’intention de prendre la navette. Elle coûte 5 euros pour vingt-quatre heures non-stop. On rouspète. C’est pas dans nos moyens. " OK, montez, je ne vous fais pas payer ! - Mais il faut qu’on revienne ! - D’accord pour le retour aussi ! " dit-il, placide et désabusé.

On subodore son analyse : ces Français, quelle engeance ! Déjeuner bâclé, le golf n’attend pas. Il faut embarquer le sac et le chariot dans l’annexe, faire plus d’un kilomètre sur la route pour trouver l’entrée de ce maudit golf. 18 trous sous une chaleur épouvantable. Dès la carte remplie, et bien remplie, le total des coups est démentiel, à ne pas divulguer. Je me précipite tout habillé sous la douche. Il faut encore retourner au bateau. C’est plus du sport, c’est une épreuve de force. Un des travaux d’Hercule. Nous déjeunons à la pizzeria de la marina. C’est Gilbert qui régale. Magnifique soirée.

Charme de CAGLIARI 
Le 24, départ de Villasimius, 6h30, pour Cagliari. Une poignée de milles à couvrir, mais avec un vent debout. Arrivée à la marina del Sole, que je connais pour y avoir été hébergé l’an passé. 46 euros, c’est le top.

Le 25, arrivée de Michel, Lợi et Rolande, qui découvre le bateau. Courses à Auchan pour compléter les ingrédients nécessaires pour faire un tiramisu géant, et le traditionnel "Crudo di San Daniele" très prisé par Michel dont les origines italiennes dominent. La préparation du tiramisu nécessite un exécutant, deux assistants-conseilleurs-rectificateurs. Pour faire bonne mesure, la quantité de marsala dépasse la dose requise.
Rolande à la barre 
Comme de coutume, l’apéritif est au champagne. Le San Daniele y ajoute sa touche exotique. Rolande souffre d’une infection urinaire. Le confort relatif de Pamplemousse y est probablement pour beaucoup. Elle décide de reprendre l’avion le 27, écourtant ainsi sérieusement son séjour et évitant du même coup une expérience de navigation ! 


Je décide d’acheter un nouveau groupe électrogène, plus puissant. C’est une course contre la montre à travers Cagliari. La voiture de Michel et son italien, qui a une bonne longueur d’avance sur le mien, sont d’une aide précieuse. Achat effectué. Honda. Résultat indéniable. Tous les appareils 220 volts du bord fonctionnent à merveille, sauf qu’il ne faut pas vouloir les faire fonctionner ensemble, sinon il faut faire appel à Enercal (fournisseur d'énergie électrique en Nouvelle-Calédonie - note du traducteur).

29 juillet, départ de Cagliari vers les 10 heures pour un mouillage forain à PORTO NUOVO. Recherche d’huîtres et de moules infructueuse. À l’aube, destination San Antioco. Mouillage forain au cap Tenlada. Nuit d’enfer sous un mistral du feu de Dieu, accompagné de réveils incessants pour vérifier que le mouillage ne dérape pas.
CARLO FORTE
On traîne pas dans le coin. Dès 7 heures, on dégage vers l’île de SAN PIETRO et la délicieuse petite ville de CARLO FORTE. Arrivée vers midi. 45 euros la nuit. Correct. On décide d’y rester deux nuits. La ville le mérite bien, et mérite surtout d’être plus connue. Étonnant, il y a très peu de voiliers étrangers dans la marina.

Dîner en ville. Au retour, une foule nombreuse a envahi l’esplanade du front de mer, à l'entrée même de la marina. De bonnes odeurs de poissons grillés agressent délicieusement les narines. Nous avons raté le coche. C’est la fête du poisson. L’odeur se répand au plus profond de nos couchettes, nous faisant regretter amèrement notre minable pizza à la San Pietro.


BALÉARES 

2 août, 9h00, départ pour les BALÉARES. Distance à parcourir : 189 milles. Vent de nord-nord-ouest 17 nœuds. Cap à l’ouest, ça promet. On est bons pour du près serré. En fait, peu après le départ, le vent adonne et nous permet de marcher au bon plein toute la nuit. Le grand dommage, c’est cette houle insupportable levée par le mistral qui a fortement soufflé des jours durant sur le Golfe de Gascogne. Quand le vent tombe à 12 nœuds, par l’effet de cette houle croisée, les voiles ont du mal à porter et la vitesse et le confort s’en ressentent. À 40 milles de l’arrivée le vent tombe complètement, mais la houle est toujours là. Il faut tout affaler car les voiles battent atrocement. Il ne faut plus compter que sur le moteur. Vers 20h30, nous entrons dans le long goulet qui mène à MAHON, la capitale de MINORQUE. Dans le clair de lune qui se lève, nous apercevons un grand nombre de voiliers au mouillage. On se déniche un petit coin tranquille où nous passons une nuit fort agréable.



Arrivée à MAHON 
L’inspection traditionnelle du moteur montre une fuite importante au niveau de la pompe à eau salée. Elle a été complètement révisée à Malte, en échange d’une facture tout aussi salée. L’impeller est neuf. Un nouvel axe a été tourné ; je ne comprends pas cette fuite après une si courte utilisation. Il faut agir. Annexe à l’eau, avec Gilbert comme interprète, direction Mahon.

À nos questions empressées, nous n’obtenons qu’une promesse d’intervention au plus tôt dans les deux semaines à venir. Obstinés, nous finissons par tomber sur l’oiseau rare, un Mayonnais (en vrai Maonès) fort sympathique, qui passe un nombre incalculable de coups de fil pour résoudre notre problème. Il nous dirige sur une société qui représente Perkins. La société Parrot est située dans la zone industrielle. Il faut prendre le bus, changer à la gare centrale : une vraie expédition.
Lợi à la palangrotte 
 
Accueillis par Paco, un petit gros, qui fait copain-copain avec Gilbert. Résultat : il faut démonter la pompe pour avoir un diagnostic précis. Retour au bateau. Dans l’après-midi, dépose de la pompe, suivie d’un coup de pêche à la palangrotte mémorable. Vainqueur toutes catégories : Gilbert, meilleur sur le nombre de prises, la patience et la technique. Le hasard fait que Charly gagne un accessit sur la taille. Un énorme maquereau est venu se suicider sur sa ligne.

Jeudi 6 : dépôt de la pompe chez Parrot, confiée à Paco. À 13 heures, coup de fil à Paco, qui déclare in extenso : " C’est pas le reten qui est foutu, c’est la bague de bronze qui appuie sur le reten. " Comprenne qui peut, pourvu que ça marche et que cette saloperie de pompe arrête d’inonder la cale d’eau salée, l’ennemi public numéro un des bateaux en ferraille.


Samedi 8 : À plein badin avec l’annexe, le bus, le changement de bus. On gère tout ça comme de vieux Mayonnais prêt à inventer la mayonnaise. On arrive chez Paco de chez Parrot. La pompe est prête. J’ajoute un bidon d’huile pour la vidange, une batterie neuve, le plein d’essence pour le groupe avec lequel on fait office de boîte de nuit pour les voisins et qui nous vaut quelques réflexions bien peu courtoises. L’annexe est over full. Remontage de la pompe à eau.
Selon certains, la mayonnaise (mahonesa ou mayonesa en espagnol) devrait son nom à la ville de Mahón. (Wikipedia)


Bricoleurs du dimanche 


C’est pas une mince affaire pour des bricoleurs du dimanche, mais deux heures après, l’affaire est réglée. Top chrono, mise en marche des réacteurs. Un bruit infernal oblige à un arrêt brutal. Dans notre précipitation à vouloir faire un essai, on oublie la baladeuse, qui se balade à fond de cale. Elle s’est prise dans la courroie de l’alternateur. Elle est en miettes. C’est du détail. Après avoir débarrassé les poulies des restes de baladeuse, qui a terminé là sa vie de baladeuse pour la finir dans la poubelle, ça marche au quart de poil.

Intermède dramatique pendant qu’une sieste réparatrice nous occupe. Le voisin tape au hublot : " Vous êtes en train de dériver !" Il faut lâcher de la chaîne vite fait !

Samedi 3, mise en train laborieuse. Vers 10 heures, tranquillement, nous nous dirigeons vers la pompe pour faire cent litres de mazout, pas plus. Je compte faire le plein en Algérie où, paraît-il, le prix est dérisoire. Il faut faire le plein d’eau, mais trois centimes le litre quand il faut en charger plus de mille ça refroidit l’enthousiasme. Il y a tolérance pour ceux qui font du mazout, à condition de limiter les quantités. On réussit à en piquer 100 litres. Restrictions sur les douches et le gaspillage jusqu’à ce qu’on puisse faire un plein sérieux.

Ensuite, direction la boutique de Miguel. On mouille. Mal nous en prend. À peine l’ancre à telle effleuré l’eau qu'arrive un zodiac aux quatre cents coups. Par signes véhéments, virulents et vérolants il nous refuse le mouillage. Je propose à Gilbert de tournera lentement en rond pendant que je vais à la boutique de Miguel en annexe. Gilbert ne se sent pas de faire la manœuvre. J’appelle alors le dit Miguel au téléphone. 

Pendant que je m’applique à remonter tranquillement l’annexe sur son portique, un énorme ferry qui appareille ne l’entend pas de cette oreille. À grands coups de sirène à nous mettre les tympans en pièces détachées, il se charge de nous faire comprendre qu’on a intérêt à s’écarter de son chemin. Il nous passe à dix mètres de l’étrave, à la grande joie des passagers tout agglutinés sur les bordés à nous faire de grands gestes à s'en démettre les articulations. La fumée s’échappe des narines du commandant à en boucher l’horizon!

Nous arrivons à CALLA RATJADA à 20 heures. Pile poil pour l’apéritif. Nous nous présentons à l’entrée de la marina. Pas un clampin en vue. Sans vergogne, nous accostons à un quai réservé aux ferries. On les a toujours dans les pattes, ceux-là. Bien évidemment, on se fait jeter, poliment mais vite fait. C’est dimanche, et le dimanche, c’est sacré. Blackout total. Nous abordons mouillage en tête la jetée extérieure. La manœuvre est classée au patrimoine mondial !

À peine en place sur ce vrai faux poste à quai, apparaissent un teuton et sa teutonne aux tétons tentateurs. Le capitaine se précipite, évidemment, pour aider à la manœuvre des nouveaux arrivants, dicté bien sûr par le devoir d’entraide entre marins et marines de tous horizons. Et mire discrètement les tétons pétulants.

C’est important, la surveillance et la protection des merveilles de la nature. Le brave allemand à un problème avec sa boîte de vitesses. Il n’arrive plus à passer la marche avant. En sus, son génois bat la chamade à tous vents. Autre problème, avec son enrouleur qui n’enroule plus, sauf ses pouces. Il demande à se mettre à couple. Se mettre à couple... Avec sa compagne, le capitaine en serait ravi !

Echange d’amabilités en anglais passe-partout. L’allemand, c’est pas le point fort sur Pamplemousse. À la limite, il vaut mieux utiliser les gestes rapprochés ! le capitaine propose un apéritif au champagne ; c’est moins voyant qu’un dîner aux chandelles. Notre ami, soupçonnant une attaque en règle sur sa moitié, prend ses distances. Mais la belle a plus d’une corde à son arc et, discrètement, laisse admirer sa petite culotte rose. L’équipage ébahi n’y tient plus. Il faut une nuit sereine pour calmer l’orage qui gronde.

Au petit matin, il nous faut trouver, toute affaire cessante avec nos aimables voisins, un vrai poste à l’intérieur de la marina. " À 12 heures promis juré, vous aurez une place ! " nous assure le compañero de service. En attendant, haro sur la ferramenta pour divers achats quincailliers. On abandonne l’annexe au voisin comme prise de guerre, qui l’aidera à réparer son enrouleur.

L’après-midi est consacré à la recherche d’un véhicule de location pour aller visiter PALMA. Celle de MAJORQUE, pas la palma de cocotier ! Après avoir consulté moult agences qui n'ont plus une seule voiture, on finit par se réserver, pour 70 euros, un coche formidable ; presque une Cadillac. L’objectif de l’escapade sur la capitale n’est pas uniquement touristique. Gilbert et moi devons faire la clearance du bateau pour être en règle avec les autorités douanières et la Police Air Frontières pour la suite des évènements sur l’Algérie. Quant à Michel et Lợi, il leur faut réserver un ferry pour rejoindre le continent.



Le skipper annonce : " Dès 8 heures demain, nous devons être sur le pied de guerre armés de nos sandwiches ! Michel fait la gueule. - Tu m’as déjà vu bouffer des sandwiches ! - Non, mais attend, ceux-là seront avec ketchup, cornichons et tout le bataclan. Dignes d’être servis à la Tour d’argent ! - Beurk ! Du ketchup, c'est pire !! " est sa réponse. Bref ! pour compenser, un apéritif au champagne remet les choses en place.

Au petit matin au petit trot d’une superbe 407, nous engageons la descente sur la capitale. Soixante-dix kilomètres, c’est pas le Pérou ! La ville est magnifique. Le front de mer vaut son pesant de touristes. Parking sur le port. Coup de bol, à deux pas de la Guardia Civil, justement là où il nous faut aller. Accueil sympathique malgré nos gueules pas si bulaires que ça et en dépit des attentats qui viennent d’endeuiller l’île. L’affaire est rondement menée, même si l’affable fonctionnaire s’emberlificote les deux doigts sur son clavier azerty. On récupère un beau papier qui ne nous servira jamais à rien, sinon à l'encadrer en guise de souvenir de notre passage à Palma, de Majorque.

L’affaire de Michel et Lợi est plus complexe, surtout pour trouver le bon service où acheter les tickets de ferry. Gilbert fait une large démonstration de ses connaissances dans la langue de Cervantès et de celle de Maria, la bonne qu’il avait en Uruguay ! Cha lui donne un drôle t'akchent patiné de portuguêch. Elle est née à Porto, alors forchément ! 

Cathédrale de PALMA 
On y est. C’est pas donné, le ferry pour aller à Valencia. Visite à pied des vieux quartiers de la ville. La cathédrale est fermée pour les pauvres. Ils n’ont rien à faire ici. Ils n'ont qu’à aller prier sous les ponts devant un hôtel en papier mâché, ça leur coupera la faim ! Les moins pauvres doivent cracher 10 euros pour entrer. Après une courte hésitation nous nous classons dans la première catégorie et commençons à mâcher les prospectus qu’on nous a si gentiment distribués. Nous passons notre chemin.
... une pizzeria arabe. 


Chemin faisant et l'estomac dans les talons, nous abordons une pizzeria... arabe. Il faut se faire la bouche avant d’être dans le vif de sujet. On nous sert une bouffe dégueulasse. Même José Bové n’en voudrait pas. 

C’est alors que le téléphone s’énerve. Pas le téléphone arabe, le mien. Ce sont nos voisins, allemands jusqu’aux dents, qui me signalent qu’ils ont laissé à la marina une voiture à notre disposition. Les clés sont à l’office. Je remercie chaudement et leur indique que je vais l’utiliser pour faire un parcours de golf dès demain matin. 


De retour à Calla Ratjada, la marina nous demande si l'on est d'accord pour déplacer le bateau, pour la nuit, jusqu’au poste de carburant. Toujours serviable quand ça coûte pas cher, on s’exécute. Mais le lendemain à 8 heures 30, notre place promise n’est toujours pas libérée et le gérant du poste de carburant hurle au loup-garou.

Il faut se déplacer du côté du quai des chalutiers. Je dois modifier ma réservation au golf. À peine terminée la manœuvre, notre place se libère. Nouveau déplacement, définitif cette fois. Je saute au plus vite dans la Scénic toute neuve de nos amis, dans laquelle j’avais déjà embarqué le sac de golf depuis la veille. La Scénic me nique au démarrage. Il faut être ingénieur des ponts et chaussées glissantes pour mettre en marche un engin pareil. El compañero de service à la marina me donne le coup de main décisif pour utiliser ce véhicule du quatrième millénaire. Du coup, je te fais un parcours de golf à la Tiger Wood.

Au douzième trou, ma belle Allemande, pas une BMW mais presque, m’appelle. Nous nous mettons d’accord pour la récupération de son véhicule. J’insiste lourdement sur l’apéritif d’adieu. Ils viendront à 21 heures. Auparavant, Michel nous invite au restaurant. Il faut se coucher tôt car demain ce sont les grands départs.

CALLA RATJADA 
La paella est consommée dans les temps et nous sommes sur le pied de guerre, l’apéritif en bataille, pour accueillir nos amis. Elle arrive à l’heure dite, essoufflée, catastrophée. Explique que son mari Wolfgang, qui n'a rien d'Amadeus, vient d’avoir un accrochage avec un fourgon policier. Il est présentement se débattant pour régler le problème. Désolée pour l’apéritif, ce sera... dans une autre vie. 


Au lever du jour, les deux partants ont préparé le p’tit-déj. Nous les accompagnons au bus. 




À 8 heures tapantes, nous larguons les amarres, tristement, de quitter ce petit coin tranquille que nous avons beaucoup apprécié. C’est le mauvais côté de nos aventures. La contrainte de devoir laisser derrière nous des amis, des villes où l’on se sent bien, pour un nouvel inconnu. Impatients néanmoins de découvrir ce qui nous attend avec une nouvelle étape. 

Un bon vent portant de 20 nœuds nous accompagne. Avec ses voiles en ciseau, Pamplemousse ressemble à un gros papillon qui se dandine gentiment. Cap sur Dellys. Episode important s’il en est.


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