samedi 21 mai 2005

DE CHRISTMAS ISLAND À COCOS KEELING



DE CHRISTMAS ISLAND 
AUX ILES COCOS KEELING


Cet article commence à CHRISTMAS ISLAND, Australie
Le 19 mai 2005
Mes coéquipiers sont (non, la petite de la photo n'en est pas*) 
Norm†Gilbert GAMBARDELLA
* Les crabes non plus.

Drapeau animé de Christmas par Pascal Gross


Rêver de Christmas island
(Photo du net) 
Au lever du jour, un spectacle éblouissant nous attend : nous sommes accrochés à 100 mètres d’une très haute falaise lourdement boisée, sur laquelle serpente une route en lacet et enlacée jusqu’au sommet. Une multitude d’oiseaux font une bruyante sarabande au-dessus de nos têtes et aux abords de la falaise. L’eau est cristalline. On devine des têtes de coraux, pourtant nichées à une vingtaine de mètres. Pendant le petit-déjeuner, une énorme tortue passe placidement à l’arrière. Sur bâbord, une jetée avec de grosses installations de chargement gâche ce paysage sauvage. Nous soupçonnons une exploitation de guano. Cela nous sera confirmé par les douaniers qui arrivent dans la foulée. Sur les traces de la douane, nous débarquons poubelles, vélo et Norm, quand même décidé à se faire examiner.



Pendant que Norm est livré aux mains du toubib, Gilbert et moi faisons les achats au supermarché. Il ne faut rien oublier. C’est la dernière chance avant Djibouti. Il n’y a pas de réapprovisionnement en vol de prévu. Déjeuner dans un boui-boui malais en face du minaret. Ça ne manque pas, à midi un haut-parleur crache son lot de propagande pour le plus grand bonheur des âmes…


La population de l’île, 1.800 habitants, est en majorité malaise et musulmane. Étrange, sur une île australienne. Ce qui ne l’est pas, ce sont les policiers. Je me fais arrêter et menacer d’amende avec mon vélo, pour non port du casque. Encore un peu, j’en ramassais une pour excès de vitesse ! De retour au bateau, nous constatons avec consternation que le bout d’amarrage a ragué sur l’attache en ferraille de la bouée du corps-mort à cause du fort roulis qui règne dans cette baie mal protégée du vent régnant.


... des crabes rouges sont eux aussi 
en villégiature sur le chemin...
(Photo du net) 
L’opération réassort eau et mazout occupe une pleine journée. Le médecin conseille à Norm de reprendre l’avion pour l’Australie et lui prescrit anti-inflammatoire et antidouleur. Il veut absolument continuer et refuse de prendre l’un et l’autre. Il préfère la méthode naturelle : laisser faire le temps. 


Le lendemain réveil inhabituel, à 3 heures du matin. Petit déjeuner discret. J’enfourche le vélo. Arrivé au bout de la ville, c’est vite fait, je prends la route du golf. Dans le noir et sur une route non goudronnée, c’est casse-gueule mais la pleine lune est là. Sur la droite, un cimetière mal entretenu avec des tombes aux fioritures baroques. 


Tout à coup, j’aperçois dans la pénombre une drôle de bestiole qui traverse la route. Je m’arrête pour l’observer. C’est un mille-pattes, ou plutôt un cent-mille-pattes, tant il est démesuré. Plus loin, des crabes rouges sont eux aussi en villégiature sur le chemin. D’après une brochure que nous a refilée le douanier, à une certaine époque de l’année, ils envahissent la route et les sous-bois pour former un gigantesque tapis rouge. D’après Gilbert, Thalassa en a fait un reportage. L’après-midi, préparation du bateau pour le départ le lendemain.



Invasion de crabes rouges à 
Christmas island 
(Photo du net) 

Samedi 21 mai. Réveil en fanfare. Départ avec un vent plutôt mollasson. Au lunch, notre Ecossais-néo-zélandais-australien sort de son mutisme congénital pour s’épancher sur son passé mouvementé. Il avait attrapé des amibes aux îles Marshall. Soigné dans un hôpital religieux, il n’avait plus que la peau et les os, au point qu’un prêtre est venu lui donner l’extrême-onction. Dans un éclair de lucidité, sentant la main de l’homme de Dieu sur son front, il s’est mis à l’insulter. Le lendemain, le père-directeur l’a charitablement mis à la porte. Un des prêtres sachant qu’il ne possédait que son pantalon et sa chemise lui a remis discrètement 10 dollars. Il fit alors la rencontre d’une maîtresse femme qui l’hébergea, le soigna et lui procura un travail de menuisier. Il était remis en selle pour de nouvelles aventures. 


Tout à coup, trêve de bavardages, un poisson s’est pris à la ligne. Je sors la caméra. Les pêcheurs s’affairent, mais il a drôle d’allure le tazar. Vu de loin, il ressemble plutôt à un poisson ballon pourvu de bizarres protubérances. En fait c’est un oiseau complètement noyé. Je me tords de rire à l’autre bout de la caméra. Les pêcheurs n’apprécient pas. Gilbert jure qu’il me fera un procès si je diffuse le film.


Mardi 24 mai. Depuis le départ, le vent, bien qu’irrégulier en force, n'a pas vraiment manqué et sa direction est on ne peut plus stable : plein arrière. Nous avons couvert 417 milles et il en reste 145 jusqu’à Cocos island. Le lever du soleil est d’une beauté exceptionnelle. Il joue à cache-cache avec un gros cumulus. Splendeur éphémère, comme la beauté d’une femme, comme la vie.


L’instant trépasse. Le remplace une boule de feu éblouissante. Elle monte sur l’horizon, pressée d’en finir avec ce jour pareil, pareil à ceux passés. Seuls les témoins auront trépassé. Mélancolie ou lassitude ? L’horizon n’en finit pas de se dérober. Quand je pense à tout ce qui m’attend, j’ai peur de ne pas être à la hauteur. Tous ces pièges qui me guettent, m’attendent pour me surprendre. Récifs inconnus, paquebots impromptus, coup de vent imprévu, pirates inattendus. Est-ce là le bonheur tant attendu ?


Mercredi 25 mai. A 12 milles environ, nous voyons sortir de l’horizon trois îles plates couvertes de cocotiers. Cet archipel ne démérite pas son nom. Le cocotier semble être le seul arbre à croître sur cet archipel corallien. Parmi ces îles, dont certaines ne sont que des îlots inhabités, DIRECTION ISLAND est la seule qui offre une possibilité de mouillage avec des fonds suffisants. Nous gaffons la bouée de quarantaine. Quatre jours pour couvrir quelques 550 milles, c’est pas si mal.


===OOO===


























Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire